LE MAGASIN DES SUICIDES par la compagnie Easy to Digest très librement inspiré du livre de Jean Teulé.
Avec Muriel Lombardi, Emmanuelle Durand et Olivier Bovet.
« M’en fout la mort »
Entre le redoutable flacon mortel de « Montaigu-Capulet », assurément plus brutal et radical que le cyanure, que deux sœurs siamoises se disputent afin de se désencastrer, l’indémodable pendaison (avec le conseil appuyé de ne pas utiliser le lustre en cristal du salon, qui casse et blesse partout), ou encore des mèches d’explosifs habilement dissimulées dans des rondelles à l’apparence de bonbons, rien n’est trop inventif dans le magasin de la famille Tuvache pour aider les candidats désireux de passer de vie à trépas. Leur fournisseur « m’en fout la mort » ne cesse de les approvisionner en produits de tous genres, tant leur boutique est prospère.
Ecrit il y a une vingtaine d’années par le visionnaire Jean Teulé et très librement adapté par la compagnie « Easy to digest », le magasin des suicides est un brûlot incandescent, un pamphlet virulent contre le consumérisme effréné de nos contemporains, qui pousse les gens, par la peur de vivre, à préférer la mort.
La compagnie a choisi d’en rire, s’appuyant sur le seul personnage attachant de cette sinistre famille : le jeune Alan, dernier-né Tuvache, venu au monde en souriant et dont le sourire, immanquablement contagieux, va mettre à mal les desseins parentaux.
Il n’aura de cesse de saboter tous les produits, de pré-scier les cordes pour se pendre, désamorcer les mèches des explosifs, ou désactiver les capsules mortelles.
Muriel Lombardi, directrice artistique de la compagnie, avec la complicité de ses comparses Olivier Bovet et Emmanuelle Durand, tous trois marionnettistes, mais aussi acrobate ou jongleuse, issus de l’univers circassien du collectif Nîmois la Basse-Cour, nous entraîne dans un univers virevoltant, aérien, formidablement réjouissant.
A l’issue d’un marathon trépidant, on assiste, haletants, à l’ultime victoire : ils ont eu raison de choisir de défendre la vie, puisque la mort elle-même… s’avère être mortelle ! Assister à la mort de la mort, ce n’est pas rien ! Ils l’ont fait, et si bien !
Petit lexique explicatif pour Easy to digest (facile à digérer…). Muriel Lombardi, élève circassienne à l’école FLIC de Turin, puis à Berlin, Bruxelles, La Seyne-sur-Mer, a pris goût pour l’alimentation alternative, en dégustant du lait de soja ou de riz de la marque en question.
Facile à digérer, leur spectacle ? Ô combien ! Un régal !
Véronique Blin
Photos: Christian Haerrig
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